Impayés avec demande d’expulsion locative sous astreinte.
En matière de bail d’habitation, face aux loyers impayés d’un locataire qui reste dans les lieux, les règles de procédure permettent en cas de loyers impayés d’assigner en Justice, c’est-à-dire de demander à un Tribunal de se prononcer par décision exécutoire.
Ces procédures durent en moyenne entre 24 et 36 mois entre le premier impayé et le moment où la force publique procède à l’exécution de la décision de Justice et expulse un occupant dont le bail s’est vu résilié pour impayé.
Il y a deux types de procédures, une en référé et une au fond toutes menées devant le récent Juge des Contentieux de la Protection dépendant du Tribunal Judiciaire (avant, c’était le Tribunal d’Instance qui connaissait des litiges locatifs).
La procédure en référé :
plus rapide, dite d’acquisition de clause résolutoire.
Le principe :
Le contrat de location contient la plupart du temps une clause résolutoire : il s’agit d’une clause qui indique qu’à défaut de paiement de l’intégralité des loyers dus dans les deux mois (pour une résidence principale) du commandement de payer signifié par Huissier, le bail est automatiquement résilié.
On parle de résiliation « de plein droit » car le juge ne peut pas apprécier la gravité de la faute : il manque 500 €, la clause résolutoire est automatiquement acquise, le bail résilié judiciairement et le locataire condamné au paiement des sommes dues et, en cas de maintien dans les lieux, expulsé. Le juge peut toutefois limiter les effets de cette sanction
Les délais et conditions :
- Un bail paraphé et signé contenant une clause résolutoire,
- Un commandement de payer préalable,
- Une dénonciation à la CCAPEX du commandement.
- Absence de contestation sérieuse (logement insalubre, problème de décence, arrêté de péril, problème sur la propriété ou la désignation du bien loué, litige sur les charges de copropriété en cours, existence d’un contentieux au fond sur le bail, etc.)
- Puis seulement, et au plus tôt deux mois une assignation en acquisition de clause résolutoire par Huissier également avec dénonciation à la Préfecture et à la CCAPEX (à réaliser par l’Huissier).
- Cette assignation devant le Juge des Contentieux de la Protection du Tribunal Judiciaire du lieu de situation du bien loué ouvre un nouveau délai de deux mois, pendant lequel l’audience ne peut pas se tenir à peine d’irrecevabilité.
- Puis la première audience se tient (donc deux mois après la dénonce à la Préfecture et CCAPEX) avec l’application, le cas échéant, du principe du contradictoire : l’affaire est renvoyée pour permettre à l’avocat du locataire, souvent saisi peu avant l’audience, de préparer la défense de son client.
- Les renvois sont en principe plus rapide que les procédures au fond.
- La décision (Ordonnance de référé) est obligatoirement exécutoire, c’est-à-dire que même en cas d’appel du locataire, la procédure d’expulsion peut être mise en œuvre même si, depuis la réforme de la procédure d’appel, l’appel se déroule selon une procédure accélérée.
Les limites et inconvénients de cette procédure en référé clause résolutoire :
- La nécessité d’un commandement de payer préalable rajoute dans les fait 2 mois et demi avant de pouvoir assigner, outre les frais dudit commandement qui alourdissent la facture du bailleur.
- S’agissant d’une procédure en référé, il faut savoir que la moindre difficulté juridique (un vice de forme, une question d’indivision, interprétation d’un congé concomitant, etc.) conduira à un rejet des demandes et obligera souvent le bailleur à reprendre sa procédure au fond depuis le début (voir infra). La facture est parfois très salée lorsque c’est en appel, après plusieurs années de procédure que le bailleur est débouté de ses demandes.
- Enfin, il faut savoir que si le juge ne peut pas refuser de constater l’acquisition de la clause résolutoire, il aura une tendance naturelle, compte tenu de la gravité que représente une décision d’expulsion, à suspendre les effets de la clause résolutoire et à accorder des délais de paiement au locataire (jusqu’à 3 ans de délais).
La procédure au fond.
A la différence de la procédure en référé d’acquisition de clause résolutoire, la procédure au fond ne nécessite pas de commandement de payer préalable.
Elle est également possible pour un bail verbal ou non paraphé ou signé, il suffit de prouver l’existence d’une location (mise à disposition d’un bien contre une contrepartie financière -loyer – ou même contre une prestation).
Comme la procédure de référé, la première audience ne peut se tenir moins de deux mois avant la dénonciation (désormais électronique) réalisée par l’Huissier, de l’assignation (demande en Justice) devant le Juge des Contentieux de la Protection.
Depuis une récente réforme de la procédure civile, les décisions au fond (on parle de Jugement par opposition aux Ordonnances de référé) sont en principe exécutoires : même si le locataire interjette appel, la procédure d’expulsion poursuit son cours.
Limites et inconvénients de la procédure au fond :
- L’aléa est un peu plus grand sur un point : le juge peut apprécier la faute du locataire. Si le locataire régularise la plupart des loyers avant l’audience (c’est une bonne nouvelle pour le bailleur), le Juge, face à un premier dossier d’impayé, aura souvent du mal à faire preuve de sévérité et à prononcer l’expulsion. On peut le comprendre, mais sa mansuétude s’évanouira en cas de nouvelle procédure.
- Les renvois entre deux audiences peuvent être longs, en fonction de l’engorgement de la juridiction.
Les délais après l’audience de Jugement sont longs.
Une fois l’affaire plaidée, le Tribunal s’accorde en pratique un ou deux mois (hors vacances judiciaires) pour rendre sa décision.
Une fois ce délai épuisé, certains greffes prennent quelques jours sinon quelques semaines à transmettre la copie exécutoire (la grosse) aux parties ou aux avocats.
Puis une fois la décision transmise, l’Huissier significateur, signifie la décision, ce qui fait concrètement courir le délai d’appel :
- 15 jours pour l’ordonnance de référé
- 1 mois pour un jugement au fond
L’huissier signifie également un commandement de quitter les lieux. Cet acte fait courir un nouveau délai de deux mois pour permettre au locataire de quitter les lieux de lui-même.
Durant ces deux mois, l’Huissier de Justice (qui ne peut exécuter seul la décision d’expulsion) ne peut requérir la force publique et l’assistance d’un serrurier.
Au bout de deux mois, l’Huissier peut enfin requérir la force publique, et là, la Préfecture met ou non en œuvre la décision d’expulsion.
En pratique, en région parisienne et dans les grandes villes, des commissions se tiennent pour déterminer dans quel ordre il sera procédé aux expulsion, en fonction des possibilités de relogement, des charges de familles du locataire, de ses ressources etc.
Ces délais sont allongés de la trêve hivernale qui prohibe toute mise en œuvre d’expulsion locative du 1er novembre au 31 mars de l’année suivante (ce qui représente tout de même 5 mois de pertes locatives pour le bailleur).
Par ailleurs, le locataire peut demander au Juge de l’exécution des délais pour quitter les lieux, et il peut solliciter la levée de l’exécution provision lorsqu’il fait appel, lors d’une procédure particulière complémentaire, devant le Premier Président de la Cour d’Appel, qui peut suspendre l’exécution provisoire d’un jugement en cas de conséquences manifestement excessives ( la perte d’un logement n’étant pas en soi une conséquence manifestement excessive : il faut démontrer des enjeux de santé, de famille etc.).